- Les banques subissent de plus en plus de pressions sur les plans réglementaire et commercial pour éviter à leur bilan toute répercussion découlant des changements climatiques et ainsi contribuer à l’atteinte de l’objectif de carboneutralité d’ici 2050 ou avant.
- Nous avons ciblé 30 institutions financières mondiales et régionales avec lesquelles nous souhaitons discuter des lacunes dans la façon dont elles intègrent les changements climatiques dans la gouvernance, la gestion du risque, l’analyse de scénarios et la communication de l’information.
- En 2020, nous avons mis en place une politique de vote sur les changements climatiques destinée aux sociétés des secteurs à impact élevé. En vertu de cette politique, nous voterons contre certaines résolutions des équipes de direction de sociétés qui ne respectent pas nos normes minimales.
- À l’avenir, nous utiliserons les leçons tirées de notre mobilisation, afin de mener des discussions éclairées avec un plus grand nombre d’institutions financières. En fin de compte, nous voulons aider les conseils d’administration à distinguer durablement leurs sociétés sur le marché, à répondre aux attentes en constante évolution des parties prenantes et à gérer efficacement les risques et les occasions liés au climat.
Nos attentes en matière de mobilisation
Les banques subissent de plus en plus de pressions sur les plans réglementaire et commercial pour éviter à leur bilan toute répercussion découlant des changements climatiques et ainsi contribuer à l’atteinte de l’objectif de carboneutralité d’ici 2050 ou avant. Elles doivent intégrer les risques liés au climat dans leurs opérations de même que dans leurs cadres de gestion du risque. Elles atténueront ainsi la transition et les risques physiques qui pèsent sur leurs propres activités et leurs portefeuilles, mais pourront aussi cibler des occasions d’investir dans le passage vers une économie à faibles émissions de carbone.
Dans le cadre d’un projet consacré exclusivement à la mobilisation, nous avons ciblé 30 institutions financières mondiales et régionales (24 dans les marchés développés et 6 dans les marchés émergents). Ce sont principalement des banques, mais il y a aussi quelques compagnies d’assurance. Notre objectif était d’encourager les sociétés à se pencher sur les lacunes dans la façon dont elles intègrent les changements climatiques dans la gouvernance, la gestion du risque, l’analyse de scénarios et la communication de l’information.
Dans le cadre de nos efforts de mobilisation, nous avons demandé aux sociétés de faire ce qui suit.
- Mettre en place des solides cadres de gouvernance en matière de changements climatiques: Les conseils d’administration jouent un rôle déterminant dans la gouvernance des risques et des occasions liés au climat. Nous avons encouragé les sociétés à définir clairement les responsabilités en matière de climat au sein de leur conseil d’administration et à s’assurer que celui-ci possède les connaissances et les outils nécessaires pour s’acquitter de cette obligation.
- Renforcer la gestion du risque climatique: Nous avons demandé aux banques d’ajouter le climat à leurs politiques et à leurs cadres de gestion du risque financier de manière à couvrir à la fois les activités de crédit et de souscription. Nous nous attendons également à ce que les banques et les compagnies d’assurance effectuent des analyses de scénarios climatiques et des simulations de crise pour évaluer leur résilience aux changements climatiques ainsi que pour orienter leur gestion du risque climatique et leur planification stratégique globale.
- Assurer une communication rigoureuse de l’information: Nous encourageons fortement les sociétés à expliquer de quelle manière elles abordent la gestion des risques et des occasions liés aux changements climatiques, en s’appuyant sur les recommandations du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC).
Les discussions sur la position des sociétés à l’égard du financement des combustibles fossiles ont été un élément essentiel de nos efforts de mobilisation. Selon un rapport du Rainforest Action Network, les 60 plus grandes banques au monde ont prêté 3 800 milliards de dollars à des sociétés du secteur des combustibles fossiles depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de Paris. L’ampleur des montants qu’elles continuent à consentir à ces sociétés présente un risque financier systémique potentiel, car les investisseurs pourraient en venir à délaisser les actifs liés aux combustibles fossiles. Les banques seraient ainsi aux prises avec de mauvaises créances.
Pour l’essentiel, nous effectuons notre travail de mobilisation seuls, mais nous collaborons si nous estimons que cela aura plus d’impact et que c’est en accord avec nos objectifs. Nous nous sommes d’ailleurs joints à un groupe d’investisseurs dirigé par des spécialistes de l’Asia Research and Engagement afin de mobiliser les banques japonaises et chinoises, et sommes devenus des membres actifs du volet bancaire de l’Institutional Investors Group on Climate Change, qui mobilisera plus de 25 banques en Amérique du Nord, en Europe et en Asie pour les encourager à s’arrimer sur les objectifs de l’Accord de Paris.
Principales conclusions
Nous discutons de la gestion du risque climatique avec les banques et d’autres institutions financières depuis plus de 10 ans. Cependant, l’élaboration et la mise en oeuvre d’un projet consacré exclusivement à la mobilisation a contribué à accélérer les progrès.
1. Cadres de gouvernance
- Un nombre croissant de banques confirment que leurs conseils d’administration ont maintenant la responsabilité de superviser la gestion des enjeux liés au climat.
- Cette attention accrue portée au climat a mené à la création de comités de direction ou de nouveaux rôles ayant pour mandat de superviser les activités de gestion du risque climatique au sein de quelques banques, dontet .
- Cependant, à quelques exceptions près, comme UBS, il reste encore beaucoup à faire en matière de responsabilité, de renforcement des capacités, de transparence et de communication de l’information, et d’incitation.
- Le succès de la campagne « Say on Climate » a attiré l’attention de quelques banques avec lesquelles nous avons communiqué. Nous les avons invitées à réfléchir à la possibilité de préparer, puis de soumettre leurs plans en matière de climat à un vote des actionnaires.
2. Gestion des risques
- Les processus d’examen du risque environnemental, y compris les changements climatiques, sont généralement axés sur les activités de crédit et de financement de projets, et visent à cibler les lacunes claires en ce qui a trait aux risques découlant de la souscription ou du financement du commerce international. Encore une fois, UBS est en tête à cet égard, puisqu’elle intègre pleinement le processus de gestion du risque environnemental et social dans l’ensemble de ses secteurs d’activité.
- Les banques effectuent de plus en plus de simulations de crise et d’analyses de scénarios liées aux changements climatiques, mais la portée de ces exercices est limitée. Les évaluations sont généralement effectuées pour un ou deux secteurs à impact élevé, et peu de renseignements sur les hypothèses utilisées ou les résultats sont communiqués. Nous savons qu’il s’agit d’un processus complexe et que les banques travaillent toujours à renforcer leurs capacités, mais nous attendons d’elles qu’elles accélèrent leurs efforts et qu’elles améliorent la communication de l’information au cours des prochaines années. Nous saluons le travail accompli dans le milieu comme I’Initiative financière du Programme des Nations-Unies pour l’environnement (UNEP-FI)1 du Groupe de travail sur l’information financière relative aux changements climatiques (GIFCC) qui vise à favoriser l’élaboration et la réalisation de simulations de crise liées aux changements climatiques. Barclays, Santander et Mizuho, entre autres, sont des membres actifs du groupe de travail.
3. Communication de l’information
- La majorité des banques des marchés développés qui prennent part au projet ont publié des rapports sur leurs progrès à l’égard des recommandations du GIFCC ou ajouté une section sur ceux-ci dans leurs rapports annuels ou leurs rapports sur la durabilité. Nous appuyons de telles avancées, mais notons que ces rapports sont généralement incomplets quant aux répercussions du climat sur la stratégie et la planification financière, et que les mesures et les cibles utilisées pour évaluer et gérer les problèmes liés aux changements climatiques ne sont pas précisées. À notre avis, les rapports du GIFCC de Sociètè Generale, de Banco Santander et d’UBS sont de bons modèles à suivre : ils contiennent beaucoup d’information sur les pratiques dans quatre grands domaines, à savoir la gouvernance, la stratégie, la gestion du risque ainsi que les mesures et les cibles. Le tableau de bord sur le climat de Barclay’s qui aborde aussi la souscription – est un exemple dans le domaine. Nous nous attendons à ce que les développements relatifs à la préparation de rapports du GIFCC et à ce que les pratiques de souscription obligatoires dans divers marchés (comme le Royaume-Uni) forcent les banques à accélérer leurs efforts.
4. Banques des marchés émergents
- Les banques des marchés émergents sont loin derrière celles des économies développées. Toutes les sociétés de ces marchés avec lesquelles nous avons discuté sont conscientes des risques climatiques auxquels elles sont exposées, et certaines ont déjà explicitement inclus le climat dans leurs facteurs de risque. Cependant, la plupart d’entre elles n’ont pas encore établi de cadres de gouvernance appropriés ni élaboré de stratégies robustes, de sorte que l’information qu’elles communiquent sur le climat est très limitée. Nous remarquons qu’elles semblent mettre l’accent sur les occasions liées au climat, c.-à-d. sur la participation au financement de la transition vers une économie à faibles émissions de carbone, plutôt que sur les risques. Les banques chinoises en particulier ont des objectifs ambitieux en matière de finance verte.
- Notre mobilisation, individuelle ou collaborative, n’a malheureusement pas entraîné de changements importants dans la gestion du risque climatique au sein des banques des marchés émergents. Cela dit, nous avons vu certaines banques prendre des mesures importantes dans la bonne direction, notamment la CIMB en Malaisie, qui a annoncé sa décision de se retirer du financement des activités liées au charbon d’ici 2040, et la banque thaïlandaise Kasikornbank, qui a effectué et publié des analyses de scénarios climatiques à l’égard des secteurs à impact élevé dans ses portefeuilles de crédit.
Notre point de vue sur la carboneutralité
Nous avons constaté une abondance d’engagements à l’égard des émissions financées nettes à zéro (c’est-à-dire les gaz à effet de serre émis par des entités qui reçoivent des services financiers, comme des prêts). Les six plus grandes banques américaines2 se sont engagées à atteindre la carboneutralité, à l’instar de la majorité des grandes banques européennes. Pour la plupart, l’objectif est d’en venir à des émissions financées nettes à zéro d’ici 2050.
Nous accueillons favorablement ces engagements, mais nous craignons que les seules ambitions à long terme ne soient pas suffisantes compte tenu de l’ampleur et de l’urgence de la situation. Les engagements à l’égard de la carboneutralité doivent être appuyés par des trajectoires claires de réduction des émissions qui comprennent des cibles scientifiques à court et à moyen terme, par la prise en compte de questions touchant les sociétés des marchés des capitaux, comme la souscription, et par des stratégies de délaissement des activités liées au charbon. Il importe aussi de repenser le soutien continu accordé au secteur des combustibles fossiles en général. Nous nous attendons également à recevoir des rapports conformes aux recommandations du GIFCC. Enfin, nous appuyons la mise en place des votes axés sur « Say on Climate », qui constituent un moyen pour les investisseurs de tenir les entreprises responsables de la qualité de leurs stratégies.
Étude de cas: HSBC et le financement des activités liées au charbon
Au cours de 2020 et du début de 2021, nous avons eu sept interactions avec la banque, y compris plusieurs rencontres avec le président, le chef de la direction et le chef de la finance durable, ainsi que de nombreux échanges avec l’équipe des relations avec les investisseurs. Nous avons discuté de la stratégie climatique de la banque et de son hésitation à mettre un terme au financement des activités liées au charbon.
HSBC s’est montrée favorable à la mobilisation, mais il aura fallu une résolution distincte des actionnaires et une pression considérable des investisseurs, dans le cadre d’initiatives collaboratives, pour réaliser des progrès significatifs.
Au début de 2021, HSBC s’est engagée à cesser progressivement de financer (y compris le financement de projets, le financement des grandes entreprises et la souscription) les centrales au charbon et les activités d’extraction du charbon thermique dans les pays de l’Union européenne et de l’Organisation de coopération et de développement économiques d’ici 2030 et dans d’autres régions d’ici 2040. Nous surveillerons de près le respect de cet engagement.
Utiliser notre vote pour orienter le changement
En 2020, nous avons mis en place une politique de vote sur les changements climatiques destinée aux sociétés des secteurs à impact élevé, notamment celui des services financiers. En vertu de cette politique, nous voterons contre certaines résolutions des équipes de direction de sociétés qui ne respectent pas nos normes minimales.
Nous demandons aux 100 plus grandes banques et compagnies d’assurance (selon leur capitalisation boursière) :
(A) de reconnaître que les changements climatiques ont une incidence sur leurs activités. Elles peuvent notamment inscrire les changements climatiques sur la liste des facteurs de risque de leur rapport annuel ou dans le formulaire 10-K.
(B) de produire une déclaration annuelle par rapport au CDP3.
Si nos recherches montrent qu’une banque a une solide stratégie de délaissement du charbon et qu’elle présente des rapports publics conformes aux recommandations du GIFCC, nous pourrions estimer que c’est acceptable même si elle ne respecte pas les critères ci-dessus. Autrement, nous voterons contre une résolution pertinente.
Par suite de la mise en oeuvre de notre politique, en 2020, nous avons voté contre 61 résolutions de la direction, comme la réélection d’administrateurs, dans 58 sociétés des secteurs des services financiers, du pétrole et du gaz, des services publics et des mines.
Nous évaluerons, au cas par cas, les propositions que les actionnaires présentent de leur propre chef en lien avec les changements climatiques, la gestion du risque climatique, la production de rapports améliorés ou des sujets connexes.
En 2021, nous avons élargi la portée de la politique, examinant les 150 meilleures banques et compagnies d’assurance (selon leur capitalisation boursière) et les institutions financières dans lesquelles BMO Gestion mondiale d’actifs détient un placement important. Nous avons également mis en place un filtre d’exclusion relatif à la déforestation pour les banques ayant obtenu la cote « 0 » à l’évaluation de Forest500. Nous pensons qu’il s’agit d’un filtre pertinent puisque la déforestation est une cause importante des changements climatiques. Nous pousserons les sociétés à établir, dans le cadre de leurs stratégies de gestion du risque climatique, des critères de diligence raisonnable relatifs au crédit et à la souscription pour les clients ou les opérations qui participent à la déforestation (p. ex., foresterie, huile de palme, soya, élevage de bovins ou production laitière).
Prochaines étapes
La finance durable, y compris une solide gestion des risques et des occasions liés au climat, devrait être un facteur déterminant de la reprise économique après la pandémie de COVID-19. À l’avenir, nous utiliserons les leçons tirées de notre mobilisation, afin de mener des discussions éclairées avec les sociétés visées par ce projet et avec un plus grand nombre d’institutions financières – en particulier celles qui commencent à peine à gérer les risques liés aux changements climatiques. Nous nous réjouissons à l’idée de continuer à collaborer avec des investisseurs qui partagent nos valeurs dans l’optique d’encourager le secteur à harmoniser ses diverses activités avec les objectifs de l’Accord de Paris et de favoriser la création d’un contexte réglementaire plus propice.
Divulgations
1 L’UNEP-FI vise à réunir les banques, les compagnies d’assurance et les investisseurs afin de créer un secteur de la finance durable.
2 JP Morgan Chase, Bank of America, Goldman Sachs, Wells Fargo, Citigroup et Morgan Stanley.
3 Si le CDP considère que c’est admissible, c.-à-d. qu’il lui demande de produire un rapport.
Les points de vue et opinions sont ceux de BMO Gestion mondiale d’actifs et ne doivent pas être considérés comme des recommandations ou des sollicitations d’achat ou de vente des sociétés éventuellement mentionnées.
Les renseignements, opinions, estimations et prévisions qui figurent dans le présent document sont tirés de sources considérées comme fiables et peuvent changer à tout moment.
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