Nous avons demandé à Malcolm White, gourou des technologies et gestionnaire de portefeuille à BMO Gestion mondiale d’actifs, qui gérait des fonds durant cette période, de nous donner un aperçu des parallèles historiques. Il explique également pourquoi l’investissement en innovation est différent et comment les institutions peuvent faire face aux courbes d’engouement.
L’histoire ne se répète jamais, mais elle rime souvent.
Bien qu’il y ait des différences importantes entre la situation actuelle et les années de la bulle Internet, les investisseurs en innovation chevronnés ont eu un sentiment de déjà vu. Notamment, la facilité avec laquelle les banques centrales du monde entier ont fait preuve de souplesse et les rondes de mobilisation de capitaux sont deux facteurs similaires qui ont contribué à l’expansion des multiples boursiers.
Tableau 1 – Une comparaison entre la bulle Internet et la pandémie de COVID-19
Facteur | Bulle Internet (1999-2000) | Pandémie de COVID-19 (2020-2022) |
---|---|---|
Liquidités abondantes | Oui – La Fed s’était radicalement adoucie et
était préoccupée par le bogue de l’an 2000. | Oui – L’assouplissement quantitatif s’ajoute à la
stimulation de la Fed pour contrer la COVID-19. |
Spéculation | Oui – La technologie annoncée était prévue
dans une décennie et était donc très spéculative. | Non – La technologie de ces sociétés était largement utilisée à des fins commerciales,
à l’exception de la cryptomonnaie. |
Forte mobilisation de fonds | Oui – Plusieurs PAPE par semaine. | Oui – Plusieurs PAPE et financement encore plus dynamique à l’aide de sociétés d’acquisition
à vocation spéciale (SAVS) et de jetons
de cryptomonnaie. |
Corrections du marché | Les replis ont été en grande partie axés sur les technologies; les titres de valeur ont affiché de bien meilleurs rendements
relatifs. | Tous les actifs à risque ont fait l’objet de ventes massives, y compris les obligations, les actions et les devises, car l’inflation a fait grimper le taux
sans risque en dollars américains.
|
Évaluations | Plus élevées, plus audacieuses, plus courtes et corrigées plus rapidement. | L’élargissement de la base des mégacapitalisations technologiques a procuré une base plus stable malgré les reculs du segment à forte croissance. |
Les contextes de placement sous-jacents étaient très différents. La bulle Internet était beaucoup plus spéculative, car les technologies sur lesquelles elle reposait étaient à près de dix ans de leur commercialisation. En revanche, les innovations de l’ère COVID-19 (commerce électronique, vidéoconférence, connectivité omniprésente des appareils) étaient bien connues et très appréciées comme des moyens d’être productif pendant les périodes de confinement. Les cryptomonnaies, qui n’étaient pas prêtes pour une adoption commerciale, ont fait exception.
Bien que les deux périodes aient ressenti l’impact d’une correction boursière, les investisseurs de 2000 pouvaient facilement contourner le secteur de la technologie et créer des portefeuilles défensifs dans d’autres secteurs au moyen d’actions de valeur. En revanche, en 2022, il n’y avait pas d’endroit où se réfugier, car l’inflation incontrôlée a forcé toutes les banques centrales du monde à augmenter les taux sans risque en guise de mesure corrective. Cela a exercé une pression sur tous les actifs, car les évaluations se sont réajustées pour tenir d’un niveau de taux d’intérêt plus élevé.
L’incidence des évaluations lors des deux périodes a également été différente. Comme le montre la figure 1, la grande majorité des sociétés technologiques se sont négociées à des multiples beaucoup plus élevés et près de 50 % d’entre elles se sont retrouvées à un niveau insoutenable. La correction qui a suivi a été rapide et prononcée. En revanche, les évaluations de l’époque de la COVID-19 ont été mieux réparties, un pourcentage moins élevé se négociant à des niveaux élevés. Sur le plan structurel, les grandes capitalisations (Apple, Microsoft, Alphabet, etc.), qui pèsent des milliers de milliards de dollars, dominent maintenant le paysage des évaluations et sont moins sensibles aux fluctuations spectaculaires du marché.
Figure 1 – Répartition historique des multiples de capitalisation des sociétés technologiques (1970-2022)

Fiche-conseils, IBES, MSCI, CRSP et analyse de Bernstein. Remarque : Données jusqu’au 26 avril 2022.
Prévisions exactes, moment mal choisi : leçons tirées d’une décennie perdue (2001-2011)
L’appétit des investisseurs à l’égard de l’innovation aujourd’hui est également différent de ce qu’il était dans la foulée de la bulle Internet. Cela peut s’expliquer par ce qui s’est passé après la correction des sociétés technologiques. Bien que les investisseurs aient eu une mauvaise expérience des placements en 2000 en raison des attentes élevées et de l’engouement entourant l’incidence potentielle de ces sociétés technologies naissantes, les prévisions apparemment exagérées de cette période se sont finalement matérialisées. N’oubliez pas que ces concepts étaient tous considérés comme des projets audacieux à l’époque. Aujourd’hui, nous pouvons faire tous nos achats en ligne, nous pouvons exécuter n’importe quelle application en ligne en utilisant l’infonuagique, nous avons développé des appareils omniprésents et des réseaux haute vitesse abordables pour offrir Internet partout dans le monde. Ceux qui ont parié contre l’innovation ont eu tort et se sont retrouvés en conflit avec le marché à la fin de la décennie perdue (2011). La réinitialisation du marché, conjuguée à une décennie de croissance en coulisses de l’innovation, a fourni un contexte propice à des rendements de placement attrayants au cours de la décennie suivante.
Les investisseurs se sont rendu compte que les facteurs émotionnels peuvent entrer en jeu et que les attentes entourant les courbes d’adoption sont presque toujours trop optimistes. Ils ont appris à décomposer l’occasion de placement en un cycle d’engouement, comme défini par Gartner, qui commence dès la première prise de conscience d’une innovation technologique. Bien qu’elle finisse par décevoir et entraîner des pertes d’investissement substantielles, elle est suivie d’une période où la croissance exponentielle d’une technologie accélère sa commercialisation. Bien qu’il soit possible d’investir à toutes les étapes de la courbe, le meilleur moment pour obtenir des rendements corrigés du risque se situe à l’intersection du pessimisme maximal et de la commercialisation précoce, comme le montre la figure 2. Cependant, cela est difficile sur le plan psychologique, difficile à prévoir et remet en question l’approche traditionnelle de placement à long terme.
Figure 2 – Décomposition des cycles de placement axés sur l’innovation

Source : BMO Gestion mondiale d’actifs.
L’investissement en innovation requiert un regard différent
La deuxième constatation a été que les approches traditionnelles ne fonctionnaient pas bien lorsqu’on évaluait l’innovation. C’est le professeur Aswath Damodaran, de NY Stern, qui en a pris conscience pour la première fois lors de la bulle Internet. Il a écrit un livre sur la façon d’évaluer les sociétés1 et s’est rendu compte que le cadre d’évaluation traditionnel repose sur plusieurs hypothèses qui ne sont pas valables pour les entreprises émergentes. Jeremy Yeung, gestionnaire de portefeuille, Technologie, BMO Gestion mondiale d’actifs, a été invité à discuter de ces différences importantes, présentées dans le tableau 2, lors d’une conférence de la CFA Society en 2020.
Le constat est le suivant : Le professeur Damodaran a reconnu qu’un cadre d’évaluation différent était nécessaire2, un cadre qui pouvait tenir compte de différentes hypothèses de croissance, comme les courbes sigmoïdes (courbes S) observées dans de nombreuses tendances d’adoption de nouvelles technologies au cours du siècle dernier. Bien qu’il s’agisse d’un nouveau cadre puissant, la ligne entre la notion selon laquelle « les anciens paramètres d’évaluation ne sont pas applicables » et l’hypothèse erronée selon laquelle « l’évaluation ne doit pas s’appliquer » est mince. Les paramètres d’évaluation s’appliquent bel et bien et, à certains moments du cycle d’engouement, la valeur implicite de l’option de croissance future de la société se négocie à une prime injustifiable et le placement doit être vendu. Cependant, il est extrêmement difficile d’en venir à cette déduction sans une expertise et une expérience adéquates.
Tableau 2 – Différences fondamentales entre l’investissement en innovation et les marchés établis
Facteur | Marchés établis | Investissement en innovation |
---|---|---|
Croissance des revenus | GDP-like growthCroissance comparable à
celle du PIB | Croissance exceptionnelle à rapide |
Rentabilité | Élevée et prévisible | Ampleur et répartition dans le temps incertaines |
Marché potentiel global | Prévisible | Inconnu et perturbateur |
Concurrence | Connue | Les premiers innovateurs ont des concurrents limités
ou inconnus |
Volatilité | Faible | Élevée; elle suit le cycle d’engouement |
Marché efficient | Oui | Non |
Évaluation | Quantifiable | Axée sur des options/Incertaine |
Source : BMO Gestion mondiale d’actifs.
L’adversité crée des occasions
L’aspect frustrant de l’investissement en innovation à l’ère de la COVID-19 est que les investisseurs ont tiré de nombreuses leçons de la bulle Internet. En 2020 et en 2021, l’innovation a permis d’atteindre des niveaux étonnants de technologie viable et commerciale. La croissance des revenus a également atteint un sommet historique au cours de cette période. En raison des confinements attribuables à la COVID-19, les consommateurs ont été contraints d’accélérer leurs courbes personnelles d’adoption des technologies. Les sociétés ont également fait un bond en avant. Satya Nadella, chef de la direction de Microsoft, a déclaré aux investisseurs que la COVID-19 a opéré « deux années de transformation numérique en deux mois »3.
Il n’est pas surprenant que les investisseurs aient voulu participer immédiatement à cette dynamique et aient été prêts à payer n’importe quoi. Les entreprises en début de croissance étaient plus que désireuses d’arriver tôt sur le marché pour tirer parti de ces multiples insoutenables. Cependant, l’inflation incontrôlable et la réaction subséquente de la Fed ont gâché la fête en neutralisant l’abondance de liquidités.
Alors que le marché clôture une année difficile, nous devons nous interroger sur ce que l’avenir réserve à l’investissement en innovation. Les investisseurs perdront-ils encore une décennie? Le secteur de pointe des technologies a été le premier à connaître une forte inflation causée par les perturbations de la chaîne d’approvisionnement et une forte croissance des salaires en raison de la pénurie de talents (la guerre des talents). Cette situation est en train de s’inverser, car le temps de réapprovisionnement des semi-conducteurs diminue et des mises à pied surviennent dans des secteurs auparavant en surchauffe. Bien que cela semble être une mauvaise nouvelle, cela pourrait s’avérer une bonne nouvelle si cette situation est le signe précurseur d’une approche plus conciliante de la part des banques centrales mondiales. Elle créerait un contexte favorable pour les rendements futurs des placements.
Nous espérons que l’histoire rimera lorsque nous chercherons des signes de reprise. Plus précisément, nous espérons que l’innovation sera une lueur d’espoir et qu’elle nous permettra de traverser cette période, comme elle l’a fait après la bulle Internet. Les premiers résultats sont prometteurs. L’an dernier, des chercheurs de DeepMind (acquis par Google) ont mis au point une application basée sur l’IA capable de déduire la structure incroyablement complexe des protéines 3D. Le processus actuel est extrêmement coûteux et peut prendre des années. L’application d’intelligence artificielle peut résoudre le problème en quelques minutes. Il s’agit d’une étape révolutionnaire vers des solutions plus nombreuses en matière de soins de santé.
Les protéines sont la clé pour débloquer des vaccins contre la COVID-19, en plus de plusieurs autres applications vitales. Cette application novatrice a ajouté plus de 200 millions de prévisions à une base de données en ligne accessible gratuitement, ce qui a modifié le cours de la recherche biologique et accéléré l’arrivée de nouveaux médicaments.
Ainsi, même si nous nous attardons sur le creux de la désillusion en 2022, l’innovation nous rappelle une fois de plus que sa croissance est indépendante de l’économie et qu’un potentiel commercial extraordinaire nous attend toujours dans les dix prochaines années. Cela nous donne de l’espoir dans l’adversité.
BMO Gestion mondiale d’actifs est entièrement déterminée à soutenir l’innovation et a fait de nombreux investissements pour accroître ses capacités. Veuillez communiquer avec votre partenaire, Ventes institutionnelles de BMO pour en savoir plus sur nos initiatives d’innovation et sur la façon dont nos équipes des actions mondiales peuvent vous aider en vous faisant part de leurs vastes connaissances, de leur expertise et de leur expérience du secteur.
1 Son manuel d’évaluation des placements est obligatoire pour obtenir le titre d’analyste financier agréé.
2 Aswath Damodaran, The Dark Side of Valuation.
3 Jared Spataro, «2 years of digital transformation in 2 months», Microsoft, April 30, 2020.
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